Rouler et glisser

Présentation de rouler

Rouler en mode doux signifie, non pas rouler en voiture ou en deux-roues motorisé mais rouler à vélos ou vélos à assistance électrique. Qu’il soit personnel ou en libre service, le vélo permet de se déplacer de manière durable. Il peut être utilisé dans les déplacements domicile-travail, pour d’autres déplacements quotidiens, mais aussi pour des loisirs ou activités sportives, ou également pour une pratique qui se développe plutôt l’été, le cyclotourisme. Ses usages sont divers en  fonction de la personne, de son usage qu’elle souhaite en faire. Qu’il s’agisse de courtes ou longues  distances, la pratique du vélo favorise les pratiques physiques des usagers et participe favorablement à notre santé.

Source : Actu Toulouse

Source : Aloès Urban Design

Source : Ville de Loos

Selon l’association Vélo & Territoires, la pratique du vélo a augmenté de 10 % début 2020 par rapport à  2019, puis a continué d’augmenter dépassant les 30%. Cela peut tout d’abord s’expliquer par les grèves de transports en commun qui ont touché la  France en début d’année 2020, mais également par la situation sanitaire liée à la Covid 19. En effet, de  nombreux aménagements cyclables, y compris temporaires, ont été mis en place suite à celle-ci, mais aussi parce que le  vélo est considéré comme « geste barrière non négligeable » et qu’un « désir de distanciation »,  notamment pour éviter le recours aux transports en commun, se fait sentir en ville. De plus, la pratique du vélo permet une autonomie et une liberté complète pour se déplacer, c’est notamment ce qu’évoque l’institut d’Amsterdam dans sa revue La fabrique de la cité : “la particularité de la pratique d’une activité physique dans l’espace public tient au fait d’être libre, gratuite et auto-organisée”. Pendant cette crise sanitaire, il s’agit de près de  640 km de continuité de pistes et bandes cyclables qui ont été aménagées en très peu de temps. 

Source image 1: la pratique du vélo en hausse de 10% en 2020, Banque des Territoires

Source image 2 : cerema, bande cyclable temporaire à Berlin. 

L’augmentation de ces pratiques s’observe plus particulièrement en milieu urbain (31%),  contrairement aux espaces ruraux et périurbains, où on ne relève que très peu d’évolution (augmentation de 14 et 15%). 

Certains freins empêchent cependant  encore de nombreuses personnes à se lancer dans une activité physique et sportive ou à avoir confiance dans l’espace public. Par exemple, les vols de vélos sont considérés comme “un frein important  à son utilisation”. C’est pourquoi de nombreux aménagements sont mis en place tels que des arceaux à vélos ou des abris fermés et sécurisés.

Source 1 : Batiproduits

Source 2 : hellopro.fr

Source 3 : abris-plus.com

D’autres dispositifs sont mis en place pour pallier ce problème de vols. Il peut s’agir de lois telles que la loi LOM (loi  d’orientation des mobilités, 2019) avec la mise en place d’une immatriculation obligatoire à compter  de janvier 2021 pour les vélos neufs, et juillet 2021 pour les vélos d’occasions. Cette mesure était  jusque là possible mais non obligatoire. Elle envisage ici de réduire les vols de vélos qui s’élèvent à  près de 300.000 chaque année sans que l’on puisse les identifier et les retrouver et souhaite ainsi  rassurer certains utilisateurs dans leurs pratiques.

Et parce qu’il n’y a pas que la sécurité qui compte pour être serein en pratiquant du vélo, des aménagements ou dispositifs en tout genre, plus locaux et novateurs se mettent aussi en place dans différents pays, afin d’assurer une certaine proximité, continuité et accessibilité dans les espaces cyclables, une certaine attractivité et diversité d’utilisation, ainsi qu’en préservant une qualité de l’espace et bien sûr tout en permettant l’appropriation par les usagers et l’inclusion de tous, puisque “une ville plus inclusive, c’est aussi une ville plus active”. C’est ce que  nous allons voir par la suite dans les fiches projets.

Présentation de glisser

“Se déplacer par un mouvement continu sur une surface lisse”. Par analogie, ce verbe concerne l’ensemble des activités de “glisse urbaine” et pas seulement liées au déplacement, puisqu’elles intègrent aussi des “tricks”, des enchaînements de mouvements. Rollers, skateboard, longboard, cruiser, trottinette… En plein boom, ces pratiques plus informelles se superposent aujourd’hui aux vélos dans l’espace public, mais aussi aux piétons, aux automobilistes… et connaissent également des conflits entre elles. Concilier les usages en pensant un nouveau partage de l’espace fait donc partie des enjeux liés à la glisse urbaine.

La glisse urbaine concerne 50 millions de pratiquants à travers le monde. 

Admis à la Fédération Française de Roller Skating depuis 1996, le skateboard est entré en 2016 dans le cercle fermé des disciplines olympiques et intègre le programme des jeux de Tokyo en 2021 et de Paris en 2024. Selon la Fédération Française Roller & Skateboard, il y a 3253 licenciés skateboard en France, avec 81% d’hommes pour seulement 19% de femmes. En réalité, le nombre de pratiquants est bien supérieur mais non quantifiable car le skateboard reste une activité physique très informelle. D’autant plus qu’actuellement, le skateboard féminin connaît un intérêt plus marqué avec par exemple le développement de journées “girl skate”, sponsorisées par des marques telles que DC Shoes. Le roller quant à lui concerne en 2020 61,897 licenciés avec 54% de femmes pour 46% d’hommes. 9 disciplines sont regroupées dans ce large ensemble : roller hockey, roller derby, roller randonnée, roller course… Cette dernière est d’ailleurs entrée au programme des Jeux Olympiques de la Jeunesse en 2018. La trottinette, enfin, est une pratique récente qui trouve ses racines dans les années 2000 et touche souvent un public jeune.

Les lieux de pratique concernent les espaces réservés : skateparks, pistes de roller… Or, les skateparks sont relativement vétustes en France de manière générale. De plus, un problème majeur se pose : le partage du skatepark entre pratiquants de la glisse urbaine. Rollers, skates, trottinettes peinent parfois à trouver leur place. 

Dans un deuxième temps, un des lieux privilégiés de la glisse urbaine est par excellence la rue. La rue, symbole de la vie urbaine, espace public à tous, pour tous. Les “skateurs” et “rolleurs” sont par leur pratique en opposition à la norme d’usage des lieux, en réalisant des “tricks” sur les trottoirs, les bancs… Cette identité liée à la rue repose bien souvent sur le déficit de lieux de pratique comme la piètre qualité des équipements. Au-delà, la rue et la glisse urbaine sont fortement liées : espaces de sociabilité, de mise en réseau, elles favorisent la pratique spontanée, créative. D’autres domaines sont influencés par la culture de la glisse : le graphisme, la musique, la vidéo, la mode. Cet imaginaire nous engage à repenser l’espace d’une manière plus créative. Selon Foucault (1984), « la rue ne s’anime que grâce à l’activité humaine ».

Ces usages détournés engendrent des conflits. Mobilier urbain dégradé, pollution sonore… Également, les pratiquants de la glisse urbaine étant considérés par défaut de définition comme “piétons” selon le Code de la Route, ils connaissent une double mise en marge. En effet, la différence de vitesse moyenne entre un piéton et un pratiquant est de plusieurs km/h. Le trottoir pourtant obligatoire est donc un espace dangereux voire impraticable. La chaussée quant à elle est interdite aux pratiquants. Restent les pistes cyclables pour accueillir ce type de déplacements mais bien souvent, pas assez entretenues : le moindre trou est un obstacle pour un skate, des rollers ou une trottinette. 

Les places et leur mobilier urbain, les dents creuses, les friches urbaines sont ainsi autant d’espaces propices à la pratique de la glisse urbaine. L’ouvrage Tokyo-skate, Les paysages urbains du skateboard publié par Julien Glauser en 2016 repose sur une « observation participante ». Lui-même skateur, l’auteur a considéré la manière de s’approprier les espaces publics par la communauté liée à la « glisse urbaine ». Par une approche sensible de la Géographie, J.Glauser suggère que la médiation avec la communauté du skate permet de comprendre pourquoi une telle appropriation des lieux publics, et de saisir les spécificités des lieux. Elle encourage également à accompagner les évolutions de cette pratique sportive et plus généralement de la société tout en limitant les conflits. Faire vivre l’espace public, voilà où réside l’enjeu. A Tokyo se déroulent par exemple « les Mardis du skate », des nocturnes dans certains lieux de la ville. De la même manière qu’à Bordeaux, un dialogue entre municipalité et pratiquants initié par le skateur Léo Valls a permis l’élaboration d’un arrêté municipal permettant la pratique à certaines heures sur des places de la ville.

Source : Jeanneàvélo

Outre leur montée en popularité et les interactions sociales qui en découlent, ces activités physiques sont bénéfiques pour la santé : en développant l’endurance au même titre que la marche, la course à pied ou le vélo, les bienfaits cardio-vasculaires, pulmonaires, musculaires et articulaires sont avérés. Le roller présente également l’avantage de ne pas être traumatisant pour l’appareil locomoteur. Ce sport enfin sollicite 90% des muscles du corps, un atout de choix dans un processus de remise en forme.

Les enjeux qui touchent la glisse urbaine sont donc de plusieurs ordres. Coordonner les usages entre pratiquants de la glisse urbaine, entre pratiquants et autres usagers des espaces publics, définir des lieux de pratique formels et informels adaptés. 

Quelques outils…

Le Ministère chargé des Sports propose dans cette optique un kit de communication “Partageons le skatepark”, à destination de l’ensemble des espaces de glisse en France. Les outils réglementaires sont puissants pour répondre aux enjeux d’usages différenciés sur les skateparks.

Source : Ministère chargé des Sports

L’intégration de mobilier de skate dans les espaces publics comme les trottoirs se fait dans certaines villes comme Bordeaux ou Paris.

Source : UnAirDeBordeaux

D’un autre côté, la médiation, l’établissement d’un dialogue et d’une relation de confiance entre municipalité et pratiquants a fait ses preuves à maintes reprises, comme à Bordeaux ou Tokyo, notamment sur les espaces publics comme les places.  

D’autres enjeux apparaissent : comment les lieux de la glisse urbaine peuvent être davantage inclusifs, en termes de genre comme de l’intergénérationnalité ? 

Un événement “girl skate”, organisé à l’espace Darwin de Bordeaux en 2019 a accueilli plusieurs centaines de pratiquantes. Soutenu par des marques de skate, il avait pour but de promouvoir ce sport auprès d’un public féminin, plus rare dans le milieu du skate.

Source : SudOuest

En France, la Fédération Roller & Skateboard propose chaque année des sorties pour tous sur les voies vertes avec le dispositif “Rando Verte Roller”. De 7 à 77 ans, en famille, inclusion du handisport… Ce genre d’événement est fédérateur et invite un large nombre de personnes à pratiquer du roller, tout en permettant la découverte de paysages naturels ou arborés. 

Source : Fédération Française Roller & Skateboard

De la même manière, les randonnées nocturnes dédiées au roller et plus largement à la glisse urbaine se font de plus en plus nombreux (“Roulez rose” de Toulouse). 

Source : RoulezRose

L’intégration d’espaces intergénérationnels dans les skateparks est un autre levier d’inclusivité : bancs, fontaines à eau, espaces ombragés, à la manière des aménagements à Stockholm. Ils permettent aux familles, aux PMR, d’observer les pratiquants et se reposer dans un espace différencié du lieu dédié à la glisse. 

Source : Rollerenligne

Rouler comme glisser sont des pratiques physiques bénéfiques pour la santé et qui connaissent un intérêt grandissant, notamment auprès des jeunes. Tous les publics sont concernés et les lieux inclusifs et sécurisés comme les événements intergénérationnels sont autant de leviers à actionner pour faire des villes des espaces au croisement entre bien-être et activité physique

Des fiches de benchmarking sont à retrouver en ce sens sur le site web

Quelques exemples de réalisations